Brett
Anderson ? Mmmh, ça me dit quelque chose. Ce n’est pas le chanteur de Suede, celui qui mangeait des tartines
de dope au petit déjeuner et a explosé en plein vol alors qu’il devait sauver
la Brit’ pop avec son groupe ? Si, celui-là même. Mais en plus vieux et
plus sombre. La rock star hautaine et encensée a déchiré son cocon pour
qu’apparaisse enfin le dandy un peu usé et irrémédiablement anglais qu’elle a
toujours été.
Si Slow
Attack est sorti le jour des Morts, il faut probablement y voir le pied de nez
d’un improbable survivant qui ne nous fera pas le coup de la rédemption et de
la joie de vivre retrouvée. Ce troisième album solo confirme que Brett Anderson
a une voix aussi dérangeante qu’indispensable, qui sait inspirer une élégante
mais noire mélancolie au vingt et unième siècle, après avoir déclenché des
révolutions hormonales lors du précédent. La chair est triste, hélas et j’ai lu
tous les livres, semblent murmurer les mélodies de Slow Attack. Le chanteur de Suede (groupe qui, entretemps, a été ressuscité
d’entre les morts) a abandonné son décorum androgyne et ses provocations un peu
vaines pour des compositions dépouillées qui laissent la part belle à sa voix,
à la fois précieuse et touchante, et au piano. Les quelques arrangements qui
ont survécu à ce grand ménage d’automne semblent d’ailleurs un peu superflus,
tant on imagine aisément ce grand échalas brisé, seul devant des touches
d’ivoire, pour nous délivrer ce beau message lent et triste en onze morceaux,
parmi lesquels les magnifiques Frozen Roads et The Hunted sauveraient sans
conteste le reste, si besoin était. Mais besoin n’est pas et Lady Heroine
n’aura pas eu la voix bouleversante de Brett Anderson ni sa facilité à enlacer
les contours de l’infinie tristesse.
Si émouvant
qu’on en oublierait presque l’heure du thé.
Henriette de
Saint-Fiel