Après le passage obligé du grand tunnel blanc et lumineux, le grand et fort
sage Eli Wallach arriva aux Portes du Paradis. En ce 24 juin 2014, à l’âge de
98 ans, il était passé de vie à trépas. Beaucoup en furent touchés, l’homme
avait (bien) joué dans plusieurs dizaines de films dont de très bons.
Cette musique là résonna soudain.
Il
fut accueilli par L’estasi dell’Oro,
morceau sublime qui illustre la fameuse scène du cimetière dans Le Bon, la
Brute et le Truand. Marylin en personne vint lui remettre sa clef, avec une
brigade de sosies de la Baby Doll d’Elia Kazan, pour faire bonne mesure. On
avait sorti le dispositif d’accueil de niveau 1. Le Grand Orchestre phil-angélique était au complet. Des milliers de voix
puissantes et célestes s’entrelaçaient pour faire éclater entre les
cumulo-nimbus des cascades d’harmonies.
Les cordes vibraient, les cuivres
étincelaient, une rythmique puissante vous prenait aux tripes et l’ensemble
dégageait une force émotionnelle extraordinaire. Même en Enfer, ils avaient du
mal à atteindre de pareils niveaux sonores et harmoniques (sans compter les
grèves récurrentes et les bouderies ou bagarres entre musiciens mais ceci est
une autre histoire). Nimbé de lumière, Eli Wallach se rendit compte qu’il avait
à nouveau son apparence de 1966, avec le costume qu’il portait pour interpréter
le Truand, aka Tuco.
Le cigare était inclus et il en tira une puissante bouffée, se sentant désormais
léger comme une bulle de champagne. C’était donc ça, après la mort, pour un
vieil acteur comme lui ? Tutto bene, comme on disait à Cinecitta ! Il
se mit à rire puissamment et son hilarité fut reprise en écho par Sergio Leone
qui assistait à cette cérémonie, barbu et flottant entre deux archanges à
poncho portant des bottes tout en jouant de l‘harmonica.
Au loin galopaient les Sept Mercenaires, portés par des chevaux de feu dont
les sabots tourbillonnaient dans une traînée d’étincelles éblouissante ;
ils arrivaient vers Eli Wallach à grande vitesse pour lui souhaiter une bonne
arrivée dans l’Eternité. Lee Van Cleef, qui n’avait jamais été une Brute dans
la vraie vie, tira alors une salve de cartouches en l’air, de sa Winchester à
chargeur infini et les festivités commencèrent. Ce n’est pas parce qu’on était
au Paradis qu’on ne devait pas manger, ni boire, nom du …Patron ! !
Quelque part sur la Terre, de belles pensées s’envolèrent vers notre homme
et il les entendit, ferma les yeux et en fut heureux. Il savait que son vieil
ami Clint Eastwood le rejoindrait bientôt et qu’ils se rejoueraient les scènes
d’antan, juste pour le plaisir.
Tu vois, le monde se divise toujours en deux catégories...
J."spaghetti" V.