Cette chanson est celle qui synthétise le mieux l’extraordinaire exaltation
ressentie par celui ou celle qui arrive dans une nocturne fête, encore bordée
de promesses. La nuit tombe à peine, il est temps de bouger loin ou vite ou
fort, et de se montrer à la porte d’une party complice, devant les velours
rouges d’une entrée réservée. Tempo entraînant mais pas assourdissant, parole
subtiles, sons flûtés et pincés, montée en puissance. Fort jolie chanson sur l’attente
et la séduction puissante de la jeunesse qui avance, toujours avance. Je vais encore
sortir ce soir, je le regretterai peut être …
Vous entrez, tombez la veste avec élégance ou le manteau avec grâce, alors
telle une gifle acceptée, la puissance du son va vous entourer, vous englober,
mettre une pression sur votre diaphragme. Ce night club où le jazz est prisé. Les
lumières seront trop crues ou trop faibles, mais votre vue va devenir
parcellaire et stroboscopique. Flash sur une épaule tatoo ou pas, une nuque
souple aperçue, regard croisé et recroisé. Un gin tonic, bleu comme l’enfer,
dans votre main.
Et la soirée se poursuit, folle ruée en avant vers les heures
hindoues, on danse, on danse. On est en sueur et un peu en transe. Spots rouges,
spots verts, le Gin Tonic tourne et retourne dans votre main, vous parlez de
plus en plus fort, de plus en plus beau. Pas besoin de bagout. Tout vous
comprenez tout, les paroles en anglais, celles en allemand et surtout pourquoi Daho
est magnifique, languide, complice, votre ami des étoiles et du soir. Vous êtes
par le tempo possédé. Vous m’avez sollicité, j’pouvais pas lutter.
Et la danse, la danse, jusqu’à plus soif ; les images s’emmêlent, les
corps se frôlent, on bondit tous ensemble, dans un grand méli mélo de jeunes
chats aux yeux verts et noirs. Refrain, couplet, tatoo bleuté, sourires échangés.
Après 03h00, le Gin Tonic a seulement le goût du Schweppes, la sueur ne colle
plus, rien ne semble pouvoir arrêter ces pieds qui volent, tournent et tambourinent
en rythme sur la piste verglacée mais rouge électrisée. Paf sur la caisse
claire, po poupoum sur la grosse caisse, et tchak sur le claquement de
cymbales.
Et le charivari s’arrête enfin. Sortir enfin, dehors à nouveau.
Seul
ou pas. Le jour s’est levé, la nuit a filé en un souffle.
Rentrer chez soi comme
un vampire, marcher sur du vent, ne rien peser, fermer les rideaux et sombrer.
Je ne peux plus me réveiller, rien à faire.
Jérôme « tombé pour Daho » V.