Chaque jour j’aperçois le puissant symbole de la tête de mort sur de trop multiples
supports et cela m’agace quelque peu. Comprenez-moi. Cette image est a priori
chargée de sens extrême, de terreur et de cette fin qui nous attend au coin du
bois. Tremblez, pauvres humains vous êtes périssables comme des yaourts et
votre date de péremption est déjà imprimée dans votre code ADN, voire sur la plaque
d’immatriculation du 35 tonnes bulgare qui vous attend sur la RN316 un soir d’automne.
En quelques mots respectueux, la tête de mort est à manipuler avec crainte,
réservée pour l’ornement du drapeau de pirates authentiques, des pochettes disques
de groupes de Death Metal et des emballages de produits interdits aux
non-chimistes chevronnés.
Mais, hélas, je vois notre pauvre crâne sur les coques de smart phones (piètre
alternative à Héééllo Kikky ?), des sacs à main pleins de paillettes et
nombre de t-shirts portés par ce que mes fils appellent des « kikou lol ».
NB : le kikou lol est de facto ce que l’on nommait en 1981 une fiotte, la
différence avec 2014 étant de l’ordre de quelques giga-octets mais les goûts musicaux
à la noix et la volonté de conformisme tiède semblent bien identiques.
Vous visualisez maintenant ce que je veux exprimer ici : la tête de
mort est partout, se montre excessivement et se peint en rose ou se décline en
guimauve. Des mères de familles au charme enfui, des élèves de CE2 qui n’ont
jamais écouté Motörhead, des fans de l’Eurovision qui n’ont jamais entendu
grand chose, des ados maigres aux dents baguées (quelle horreur !) et même
des vacanciers bedonnants , tous arborent le crâne humain en toute insouciance.
Moi je dis : « non, non, non ! », je pousse un cri et
m’insurge. Mais cela restera un craquement dans le vide interstellaire, un appel sans
écho, un bruit déchirant la nuit froide dans un cimetière sinistre, émis par un
squelette abandonné dont le crâne ricane et grimace. Et ça, ça fait peur !
Jérôme V.