lundi 2 mars 2015

Une consultation musicale avec H-Burns


Neil Young, Bruce Springsteen, Los Angeles, Slayer, voila de quoi on parle avec H-Burns, un après-midi, dans les locaux de Because Music, près de Barbès. Renaud Brustlein, tout vêtu de noir, assis dans un vieux fauteuil rafistolé, a accueilli Songazine pour une visite musicale.

Le côté prolo et proche des gens
Son nouvel album Night Moves est teinté de plusieurs influences. On y retrouve du Neil Young avec  On The Beach sur lequel il s’est inspiré de l’ambiance. Il décrit l’album : « J’adore ce disque. Quand Neil Young l’a écrit, il était au sommet de sa gloire mais en même temps en pleine déprime. Dans cet album, on trouve la coolitude californienne avec derrière une douce déprime. »
Didier l’Embrouille est le premier fan de Dick Rivers après Dick Rivers lui-même. Renaud Brustlein est le premier fan de Bruce Springsteen après le Boss lui-même. « C’est The Boss, Bruce Springsteen est partout dans ma vie ! Cet homme a l’avantage sur ces influences qui ne sont pas que musicales. C’est presque de la sociologie. J’aime l’énergie qu’il dégage, sa longévité, sa sociabilité et sa carrière. J’aime le côté prolo du mec et proche des gens, »explique-t-il. De cette admiration, sortent deux albums, Nebraska « pour son côté tréfonds de l’album solo » et Darkness On The Edge of Town avec sa « puissance dépressive. » 
C’est ce côté prolo, proche des gens que s’inspire H-Burns sur le public. « Le côté springstieenien c’est de pouvoir toucher le spécialiste de musique indé du XIème arrondissement comme le routier qui écoute radio autoroute. Je trouve super de passer sur FIP et en même temps sur Radio Autoroute. »
Le songwriter américain Elliot Smith, a joué une influence fantomatique durant l’enregistrement. « Nous avons travaillé avec son producteur Rob Schnapf, et dans le studio trônait des guitares, dont celle d’Elliot Smith. J’ai eu la chance de composer avec les siennes. »
Troy Von Balthazar et A.A. Bondy ont collaboré avec lui dans son nouvel opus.  Il raconte sa participation avec eux : « A.A. Bondy a enregistré le disque Believers en 2011. C’est l’album qui m’a donné envie de travailler avec lui. J’en ai parlé à Rob qui est son producteur aussi. Il est parti le voir. Le lendemain, il était au studio. Il a voulu jouer avec nous car il était amusé qu’on puisse traverser le monde juste pour jouer avec lui, à cause d’un disque. C’est une chouette histoire ! » Quant à Troy Von Balthazar : « C’est une histoire de connexion. Il joue dans le groupe Chokebore. C’est un ami d’une amie qui joue avec Cat Power. On s’est vus, et le courant est passé. Nous avons joué directs ensemble. Il se trouve, en plus, qu’il avait enregistré un album dans le même studio. C’est un peu small world. C’est fun. »

Tacos, Corona et Amoeba
Los Angeles, la cité des anges, Renaud Brustlein et sa bande y sont partis enregistrés le disque. Il en garde un très bon souvenir de son séjour. Entre manger dans le plus vieux diner de la ville le Musso and Frank et faire une virée nocturne sur les collines d’Hollywood à la recherche de la maison de David Lynch dans Lost Highway, il explique l’ambiance de la Californie : «  Sympa est le mot qui résume mon séjour. C’était à la cool. Tu fais du midi-minuit sans jamais être stressé. Rien à voir avec Paris. » Notre guitariste a réussi à prendre le rythme californien : « pendant un mois, nous avons vu des mecs manger des tacos, boire de la Corona, fumer des cigarettes magiques. C’était vraiment détente. Au premier moment tu peux être perturbé par cette ambiance mais une fois que tu l’as c’est cool. Au bout de deux semaines j’étais dans le bain, et j’étais dégouté de partir. »
Pour un bon séjour rock à L.A. il faut suivre le guide H-Burns. Un endroit pour trouver un disque rock : « L’Amoeba est le plus grand disquaire de rock indé au monde.  C’est tellement immense que j’ai dû faire trois rayons le premier jour. J’étais obligé de revenir le lendemain, pour continuer mes recherches. C’est une véritable bibliothèque sur trois étages. Il y a de tout, des caisses remplies de vieilles cassettes, de vieux magazines. Tu veux vraiment fouiller, il faut y rester une semaine. Un véritable féru de musique meurs d’une crise cardiaque dès qu’il rentre dans le magasin. »
La nuit, si ça vous tente de faire un concert allez à The Echo : « C’est une salle de concerts cool. Une fois sur deux de bons groupes passent le soir. C’est en quelque sorte la salle indé de Los Angeles. »

Un vrai groupe qu’est ce que c’est ?
Le rock d’aujourd’hui selon H-Burns : « Nous vivons dans une époque superficielle. Il existe trop de calculs de la part des jeunes groupes. La communication, le visuel passent avant les chansons. Ils sont toujours dans le calcul pour courir après l’air du temps, pour savoir ce que les gens aiment entendre. Nous ne vivons pas dans une époque les plus marquantes en matière de rock. » Il enchaîne sur la définition d’un vrai band : « un groupe de musique est celui qui se construit autour des chansons. Ils sont en perpétuelle évolution. Ils se remettent en question sur chaque disque. Ils vont au bout des choses. S’ils veulent faire un disque de clavier, ils vont le faire, même si la mode des claviers s’était il y a cinq ans. Le cheminement personnel doit être privilégié face à ce que l’auditeur pourrait éventuellement entendre. C’est devenu rare aujourd’hui pour un groupe. »
Sur ces bonnes paroles, H-Burns est prêt à reprendre la route pour nous jouer Night Moves. Une moitié d’album serait déjà écrite, pour le lieu d’enregistrement du prochain le choix se porte sur l’Ecosse : « Je voudrais enlever l’image américaine, faire un contre-pied. Ça fait deux albums qu’on compose aux USA. Les gens ne parlent que de l’Amérique. L’Ecosse est un pays intrigant. C’est d’une rare beauté sauvage et en même temps d’une laideur postindustrielle, comme à Glasgow, mais qui peut être inspirante musicalement. »
A la fin de cette consultation musicale, Il nous raccompagne à la porte d’entrée comme le ferait un médecin, « J’ai l’impression parfois d’être un généraliste avec son client, quand je raccompagne les journalistes, » sourit-il « N’oubliez pas de prendre vos médicaments, » en serrant la main. Sur ces derniers conseils, Night Moves est à écouter « la nuit dans une grande ville, avec un casque. C’est un disque de casque ou de voiture. C’est là qu’il prend toute son ampleur. »

Thomas Monot

Prescription musicale d’H-Burns :
Une chanson sous la douche : « Ce N’est Rien de Julien Clerc. Magnifique chanson et les paroles sublimes. Je pense aussi à Holidays de Michel Polnareff. Je suis très Nostalgie sous la douche, même si  je n’ai pas l’habitude de chanter dessous. »
Pour se donner du courage : « Avant un concert, je me mets du Roy Orbison. C’est un vieux crooner des années 50-60. J’éteins la lumière et je l’écoute. Ça me met dans le bain direct. »
Une énervée : « Raining Blood de Slayer. Je ne me suis pas énervé depuis longtemps. Ma période énervée date de mon ère métal quand j’avais 14-19 ans. Un de mes plus beaux concerts était Slayer en première partie de Machine Head, à Lyon en 1994. Je crois que c’est ce groupe qui m’a donné envie de faire de la musique. Il y avait aussi les Guns et Metallica. »
Une pour la joie de vivre : « Tu Peux Préparer le Café Noir, d’Eddy Mitchell. Je suis en train te régaler avec ma playlist Nostalgie. »

Un album favori : “Highway 61 Revisited de Bob Dylan. J’aime bien sa verve. La liberté de parole mélangée avec une sauvagerie rythmique. C’est un disque fleuve. Il existe une folie dans ce disque. C’est vraiment l’instant de la vie d’un homme qui est au sommet de son art. »


H-Burns, aka Renaud Brustlein