Je suis un béotien absolu en matière de musique classique aussi bien que
contemporaine. A part Vivaldi et ses musiques d'attentes téléphoniques
interminables ou Mozart, cet autrichien qui a fait de la publicité pour Air
France, Beethoven et son hymne pour les mous de Bruxelles ou le générique du
"Masque et la Plume". Jetez-moi des pierres en si bémol pour piano et
orchestre, je ne connais rien en ce domaine.
Mes humbles connaissances démarrent avec les premiers bluesmen...donc point
de perruque poudrée, ni de queue de pie et de chefs d'orchestre tumultueux ;
zéro pointé de ce côté et je perdrais le million si la question finale à la
télé portait sur Chopin ou le Deutsche Gramophon expliqué aux enfants. Pour
mézigues, Brahms, à part le cri du cerf, je vois mal à quoi cela ressemble.
Riez, gens cultivés de la symphonie et du menuet, un analphabète des trois accords vous contemple.
Cependant, je reçois un disque à écouter qui pourrait s'apparenter (un peu)
à ce genre musical, PIANO GLASS, œuvres de Philip
Glass interprétées par Bruce
Brubaker. Challenge, défi pour le rocker et son cœur de larsen, assurément
un registre inhabituel !
Le premier étant un immense compositeur de musiques allant du minimalisme
et du répétitif à l'opéra en passant par les B.O. majestueuses et le second un
grand pianiste américain très admiré et talentueux qui joue du classique et du
contemporain (voir mon préambule, on ne s’est jamais croisés !).
Le Festival de la Roque d'Anthéron est le cadre typique de ses apparitions dans l'hexagone et la probabilité de m'y croiser avoisine celle d'un tenancier de bar à eaux de voir rentrer Lemmy dans son établissement offrant une tournée générale de Badoit à ses roadies.
Le Festival de la Roque d'Anthéron est le cadre typique de ses apparitions dans l'hexagone et la probabilité de m'y croiser avoisine celle d'un tenancier de bar à eaux de voir rentrer Lemmy dans son établissement offrant une tournée générale de Badoit à ses roadies.
Malgré tout ceci, j'ai écouté avec plaisir ce CD, et plusieurs fois de
suite.
Ici, du piano et uniquement du piano. Des motifs répétés, des notes qui
reviennent, une couleur musicale très cohérente. Un jeu qui provoque émotion et
nostalgie, parce que la beauté s’en échappe comme une fumée enivrante, un
parfum capiteux.
Soudain, je comprends pourquoi l'écoute de ces plages sonores me procure
une sensation forte et durable. En termes d'images c'est évident : ici, s’étend
virtuellement une mer infinie de notes cristallines que je contemple, face à l’horizon
si vaste. Elle est grise ou verte mais changeante et vivante, à la fois toujours
identique et toujours renouvelée. Des vagues régulières la parcourent et
reviennent sous les doigts du pianiste, patient et virtuose. Des motifs apparaissent en boucles entêtantes qui montent et descendent. Il convient de se laisser bercer par les dentelles
subtiles d’accords et arpèges de Philip Glass.
La marée est basse, il faut rentrer au port et en tirer les bonnes
conclusions.
Amis de la musique amplifiée et lecteurs de Songazine, voici un CD
recommandé pour vous égarer hors des sentiers habituels, prendre de la hauteur
et se sentir un peu plus intelligent, ou humain au choix, à la fin d’un long et
beau périple sonore.
Sur les flots de l’océan des 88 touches navigue Piano Glass, navire amiral
d’une flotte étrangère mais néanmoins amie : le drapeau de l’Art y flotte
haut et fort.
Jérôme « Steinway » V.