Lors
d’une belle soirée de mai, Seasick Steve, du haut de ses 74
ans et de sa longue barbe blanche, était au rendez-vous au Bataclan. Accompagné
de son acolyte batteur Dan Magnusson, il a donné un magnifique concert de
blues-rock. Le public, de jeudi soir, était composé de vieux briscards du rock
comme de jeunes loups, avec au milieu des sosies du bluesman. Ils se sont
amassés devant la scène, où la jeune et jolie Nina
Attal a assuré, seule avec sa guitare acoustique la première partie.
Entracte.
La
foule attendait impatiemment le guitariste, avec du Led Zeppelin, en fond sonore.
Les lumières s’éteignent. Le maestro arrive armé d’une bonne bouteille de vin à
la main. Il salue le public, caresse sa barbe blanche, rejoins sa vieille
chaise qui doit être aussi âgée que lui, branche sa guitare, fais un signe de
tête à son batteur.
Let’s go to boogie ! Il enchaîne les chansons et les
guitares entre deux gorgées de rouge et des petites histoires de femmes, de
voyages, de voitures peuplant sa longue expérience rock’n’roll. Summertime Boy, Dog Gonna Play,
Barracuda’68, et Roy’s Gang se suivent avec d’anciens morceaux de son
répertoire. Cette dernière a été joué par une des ses guitares fabriqués par
ses soins. Celle-ci, se compose d’une seule corde, d’un manche de guitare
accolé à une planche à laver faisant office de caisse de résonance avec au dos
une plaque d’immatriculation du Mississippi. On peut penser que ce bricolage ne
marcherait pas et pourtant, elle sonne comme une vraie guitare électrique. Cet
homme, à la casquette de routier et à la chemise de bûcheron, est un virtuose
mais aussi un très grand romantique. Pour une de ses Love song, comme il les appelle,
il a choisi une damoiselle parmi plein de prétendantes dans le public. Elle
est assise devant lui, gênée mais tout aussi impressionnée d’être en face de
Steve. L’heureuse élue l’écoute et le dévore de ses yeux émerveillés par ce
moment.
Sur
scène, Seasick Steve est autant déchaîné que son batteur, il a mis au placard
le poids des années. Il triture sa guitare. Il lui fait sortir des sons de ses entrailles.
Il la fait couiner. Il se balade sur scène avec elle, ne la quittant que pour
une autre après chaque chanson. C’est juste splendide. Après un rappel de trois
titres, il finit en apothéose par un boogie infernal. Le batteur déchainé se
lève et jette une cymbale au public pour clouer le spectacle. A peine remis de
leurs émotions, les deux musiciens s’approchent du bord de la scène pour
saluer, serrer des mains, signer des autographes à un public conquis. C’est une
véritable ovation, pour ce gars qui a connu le succès à ses 60 ans. Les
rockeurs présents, ses grattes, et lui ont fait corps le temps d’1 heure 30 de
blues-rock.
Thomas Monot